On a 70 ans, oui, mais depuis quand ?

 

En ce printemps 2025, Qualifelec fête son 70e anniversaire. Mais quelle date retenir comme origine officielle ? Le 27 mai 1955, jour de l’Assemblée générale constitutive ? Ou le 1er juillet de la même année, date de signature du protocole avec les deux ministères de tutelle de l’époque ?

Derrière cette question de calendrier, en apparence anecdotique, se cache une histoire bien plus dense. En effet, Qualifelec ne naît pas d’un simple acte administratif. Elle est le fruit d’une véritable gestation, d’une prise de conscience collective, d’un projet structurant mûri par les professionnels eux-mêmes.

Au cœur des Trente Glorieuses, la France se reconstruit à vive allure. Tous les secteurs se modernisent, et l’électrification du territoire devient un axe stratégique. La qualité des installations électriques devient une préoccupation essentielle, tant pour la sécurité des personnes, que pour la fiabilité des équipements.

Pour Robert Comtet, futur premier président de Qualifelec, la chose est claire : « La qualité des installations est directement liée à la valeur professionnelle de ceux qui les exécutent. »

C’est cette conviction qui anime les fondateurs de Qualifelec. Ils veulent poser les bases d’un métier utile, exigeant et fiable. Ils veulent organiser, dans l’intérêt général, les conditions d’une évaluation rigoureuse, équitable et partagée des entreprises et professionnels installateurs électriciens.

Voici leur histoire.

 

Que se passe-t-il dans les années 50 ?

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la priorité est claire : reconstruire rapidement un pays et une économie profondément meurtris. En 1946, 17,5 % des foyers ruraux et 5,7 % des foyers urbains n’ont plus accès à l’électricité, du fait des destructions causées par les combats.

L’État prend alors une décision fondatrice : nationaliser l’électricité et créer EDF. L’ambition est immense : il s’agit de garantir l’accès universel à l’électricité, reconstruire le réseau, et faire entrer la France dans la modernité. Dans les années 1950, l’électrification s’accélère à un rythme sans précédent. C’est une révolution silencieuse qui transforme les foyers, les villes, les campagnes, les modes de vie. On voit même apparaître les premières conseillères ménagères, chargées d’enseigner l’usage de l’électricité au quotidien, tout comme la maîtrise du bœuf bourguignon sur plaque électrique.

Cette dynamique accompagne, et rend possible, la période de croissance des Trente Glorieuses. A mesure que les usages se développent, la question de la sécurité des installations devient incontournable. Qui installe, avec quelle compétence, et avec quelles garanties de sécurité ? Car dans cette France électrifiée à marche forcée, tout le monde, ou presque, peut se dire installateur électricien. La priorité à la liberté d’entreprendre règne sur l’ensemble du territoire, à l’exception de l’Alsace-Moselle. Aucune compétence technique minimale n’est requise.

Le contrôle des installations, lorsqu’il existe, repose sur l’installateur lui-même et le distributeur d’électricité. EDF n’a pas reçu mandat pour contrôler les installations intérieures. Il faudra attendre 1960 pour qu’un décret impose enfin cette vérification.

Quant aux règles de l’art, elles sont encore floues. La norme NF C15-100, qui deviendra plus tard le socle de référence pour les installations domestiques, n’est homologuée qu’à la fin de l’année 1956, et ne s’imposera qu’en 1969.

Le thème de la réglementation de la profession d’installateur électricien devient central pour les organisations syndicales de la profession. D’autant que le nombre d’entreprises d’électricité ne cesse de croître. Dès juin 1949, la section permanente du Conseil Supérieur de l’Électricité formule un vœu concernant les modalités d’agrément des installateurs. Mais le Conseil d’État s’oppose à toute restriction législative du droit d’établissement. Alors, que faire ?

Face à cette impasse, les organisations syndicales ne baissent pas les bras. Elles réclament un cadre. Non pas pour exclure, mais pour mieux faire.

En mars 1957, Robert Comtet résume ainsi la situation : « Nombreux sont ceux qui pensent que notre profession est facile à exercer et qu’il suffit d’avoir cloué quelques moulures et réussi à faire fonctionner une sonnerie pour se déclarer Electricien. L’expérience est souvent cuisante et la statistique confirme qu’il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Les élus, ce sont ceux qui ont compris la nécessité d’une adaptation sérieuse à notre métier dont les règles de l’Art sont, en fait, pami les plus difficiles à connaître, à appliquer et à suivre dans leur constante évolution. »

Puisque l’agrément ne peut venir de la loi, il viendra de la profession elle-même. Ce sera un outil de reconnaissance, élaboré collectivement, fondé sur des critères objectifs, partagé avec les donneurs d’ordre et orienté vers l’intérêt général.

 

Vers un code d’honneur pour les installateurs électriciens ?

Qualibat existe depuis 1949, et les électriciens peuvent déjà y obtenir une qualification. Pourquoi, dès lors, créer un organisme de qualification spécifique, distinct du Bâtiment ?  Les organisations professionnelles en sont convaincues : le métier d’installateur électricien mérite un cadre adapté à sa technicité, à la diversité de ses interventions (bâtiment, industrie, travaux publics) et à la spécificité de ses structures représentatives, elles-mêmes indépendantes du Bâtiment.

Qualifelec devra donc être un organisme indépendant, conçu pour répondre aux enjeux concrets du terrain. Il sera administré par les parties prenantes des marchés de l’installation électrique.

Le 12 février 1955, Henri Uver, ministre de l’Industrie et du Commerce, adresse à la FNEE (future FFIE) une lettre d’accord de principe pour la création d’un organisme de qualification et de classification de l’équipement électrique. Ce futur organisme, explique-t-il, devra répondre à un besoin fondamental : apporter au public une plus grande sécurité, en lui permettant de choisir, pour l’exécution des travaux, des professionnels possédant les connaissances techniques indispensables.

Publication par la FNAE de la lettre du Ministre Henri Uver du 12 février1955

 

Fort du soutien de l’administration, un groupe de travail est constitué. Il réunit, notamment, des représentants de l’Etat, de l’UTE, d’EDF, de la FNEE et de la FNAE (future FEDELEC). La première réunion se tient le 25 février 1955 ; les conclusions sont rendues le 27 avril.

Un mois plus tard, le 27 mai, l’assemblée générale constitutive officialise la naissance de Qualifelec. Les membres fondateurs sont : l’Ordre des Architectes, EDF, l’UTE, la FNAE et la FNEE.

Le 1er juillet 1955, un protocole est signé avec les ministères de tutelle (Industrie et Commerce, d’une part, Reconstruction et Logement, d’autre part). L’Etat et les collectivités locales, en tant que clients et garants de l’intérêt général, souhaitent pouvoir s’appuyer sur des professionnels sérieux. Pour cette sélection, ils s’en remettent aux institutions en place, tout en exerçant un contrôle sur celles-ci grâce à leur présence au sein des instances de Qualifelec.

 

En juillet 1955, Robert Comtet, toujours, pose les bases éthiques de cette ambition :

« Notre organisme de qualification et de classification n’est pas la charte d’un petit groupe de privilégiés soucieux de se protéger dans un bastion inaccessible ; c’est le code d’honneur auquel déclarent adhérer ceux qui ont conscience que leur activité doit s’exercer conformément aux enseignements qu’ils ont reçus, afin que leurs réalisations répondent aux prescriptions de qualité, inscrites dans les normes. […] Nous avons, Messieurs, un outil excellent dont nous devons nous servir maintenant avec la conscience et l’honnêteté qui devront justifier la confiance qui nous a été donnée. »

 

Comment créer un système de qualification pertinent ?

Il faut maintenant donner corps à ce projet. Le système de qualification sera ouvert, exigeant, fondé sur des critères définis par des professionnels, pour des professionnels, en dialogue avec les représentants de l’État et des clients. L’évaluation s’effectuera entre pairs et impliquera également les parties prenantes du marché, apportant une légitimité forte aux décisions rendues.

Ainsi, en juin 1956, les critères de qualification sont finalisés. À l’automne, les territoires des commissions régionales sont délimités. Les entreprises désireuses de se qualifier auprès de Qualifelec retirent un dossier, instruit localement. Chaque commission émet un avis ; le conseil d’administration attribue ensuite la qualification et la classification.

Le 13 février 1957, la publication du règlement intérieur de Qualifelec marque le démarrage opérationnel de l’activité. La qualification historique de Qualifelec est mise en place. Dénommée « Équipements Électriques», elle correspond à l’activité principale des électriciens, plus généralement appelée « Électricité Générale ».

Dès mars 1957, Qualifelec examine 99 dossiers et attribue ses premiers certificats de qualification. Deux ans plus tard, près de 3.000 entreprises ont engagé la démarche La dynamique est lancée. La profession s’est dotée d’un outil qu’elle a elle-même construit. Un outil pour faire reconnaître ses savoir-faire, structurer ses pratiques et répondre aux attentes croissantes du marché.

Robert Comtet prophétise alors « le titre Qualifelec sera bientôt un titre envié, recherché, mérité et indispensable. »

 

La dynamique engagée dépasse les initiateurs. En 1960, la section électricité de la FNAB (future UNA3E-CAPEB) rejoint Qualifelec, suivie en 1961 par la Fédération Nationale des SCOP, puis en 1977 par le SERCE.
La qualification devient ainsi un sujet partagé, porté par l’ensemble des familles professionnelles du secteur. Toutes les bonnes volontés se rassemblent pour donner ampleur, autorité et représentativité à un organisme conçu au service de l’intérêt général. Les représentants de ces différentes organisations professionnelles se succèderont, alors, à la Présidence de Qualifelec.

 

Soixante-dix ans plus tard, nous préférons toujours l’excellence.

En 2025, plus de 8 000 entreprises portent aujourd’hui le signe de qualité Qualifelec.

Le contexte a changé, les technologies aussi. Les normes se sont multipliées, les usages se sont complexifiés. Mais l’idée fondatrice, elle, demeure : la qualification est une exigence utile, humaine et partagée.

Elle repose sur une conviction simple : donner confiance. Aux donneurs d’ordres. Aux clients. À ceux qui veulent choisir, en toute transparence, des professionnels compétents.

C’est la mission de Qualifelec depuis 1955. C’est toujours la nôtre aujourd’hui.

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